Collaboration intercommunale et fusion de communes en suisse

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Résultats d’une étude empirique et jalons pour une gestion systématique de la coopération et de la fusion.

Reto Steiner, Institut de l’organisation et du personnel, Université de Berne

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Collaboration intercommunale et fusion de communes en suisse

  1. 1. Collaboration intercommunale et fusion de communes en Suisse Résultats d’une étude empirique et jalons pour une gestion systématique de la coopération et de la fusion Reto Steiner, Institut de l’organisation et du personnel, Université de BerneSommaireSommaire.................................................................................................................................................................11 Introduction..........................................................................................................................................................2 1.1 Problématique générale...................................................................................................................................2 1.2 Objectifs et bases empiriques..........................................................................................................................22 Limites de performance et mesures de réforme................................................................................................33 Collaboration intercommunale...........................................................................................................................5 3.1 Définition de la notion de « collaboration intercommunale ».........................................................................5 3.2 Arguments pour et contre la collaboration intercommunale...........................................................................6 3.3 La collaboration intercommunale en Suisse....................................................................................................7 3.3.1 Appréciation faite par les cantons............................................................................................................7 3.3.2 Appréciation faite par les communes.......................................................................................................94 Fusion de communes..........................................................................................................................................13 4.1 Définition de la notion de « fusion de communes »......................................................................................13 4.2 Arguments pour et contre les fusions de communes.....................................................................................13 4.3 Les fusions de communes en Suisse.............................................................................................................16 4.3.1 Appréciation faite par les cantons..........................................................................................................16 4.3.2 Appréciation faite par les communes.....................................................................................................185 Rapport entre collaboration intercommunale et fusions................................................................................236 Jalons pour une gestion systématique de la coopération et de la fusion.......................................................257 Bibliographie citée..............................................................................................................................................29 1
  2. 2. 1 Introduction1.1 Problématique généralePar rapport à d’autres pays, l’organisation communale de la Suisse s’est avérée extrêmementstable depuis la fondation de l’Etat confédéral en 1848. Les communes, de taille très variablemais en majorité très petites, n’ont pas fait l’objet jusqu’ici d’une tentative d’uniformisation àgrande échelle par le biais de fusions de communes. La taille moyenne des communes suissesest de 840 habitants (valeur médiane).Entre 1848 et 1999, le nombre de communes politiques n’est tombé que de 3203 à 2903.Seuls quelques rares cantons, comme Fribourg et Thurgovie, ont engagé des fusionscommunales en plus grande nombre au cours des dix dernières années (cf. Dafflon 1998 :125ss). Afin que l’accomplissement des tâches puisse aussi être garanti dans les petiteslocalités, les communes suisses s’emploient depuis le 19e siècle surtout à la collaborationintercommunale (CIC) (cf. Meylan et al.1972 : 57).Depuis quelques années, les communes subissent une pression croissante, car- d’une part, les tâches communales se sont multipliées et, d’autre part, elles sont devenues plus complexes et aussi plus interdépendantes (cf. Germann 1998 : 6ss) ;- avec la récession économique générale, la situation financière des communes s’est aggravée et leur quote-part d’endettement, en particulier, a augmenté (cf. EFV 1999 : Internet) ;- le niveau d’exigence des habitantes et des habitants s’est accru, tout comme d’ailleurs leur propension à la critique, tandis que la disposition à assumer une fonction politique a plutôt baissé (cf. Geser et al. 1996 : 5ss).Comme l’indiquent une enquête de 1998 auprès des secrétaires communaux et d’autres étudescomparables plus anciennes, les communes se heurtent de plus en plus à des limites deperformance dans l’exécution de certaines tâches publiques. Dès lors, la question est de savoirdans quelle mesure le découpage politique du territoire datant du 19e siècle est adapté auxdéfis économiques, politiques et sociaux du 21e siècle.1.2 Objectifs et bases empiriquesCet article fournit un aperçu de la collaboration intercommunale et des fusions de communesen Suisse. Le chapitre 2 traite des limites de performance des communes et des mesures deréforme envisageables. Puis, nous nous intéresserons plus spécifiquement, aux chapitres 3 et4, à la collaboration entre les communes et aux fusions. L’état actuel du débat à ce sujet dansles cantons et les communes est étayé par des données empiriques. Enfin, dans le dernierchapitre, la combinaison des principaux paramètres des projets de coopération resp. de fusionpermet d’élaborer un cadre conceptuel susceptible de servir de modèle à une gestionsystématique de la coopération.Outre les références faites à la bibliographie existant dans ce domaine, cette contributions’appuie essentiellement sur les résultats d’une recherche empirique. Dans le cadre d’un projetdu Fonds national suisse de la recherche scientifique sur « Les réformes communales »,réalisé à l’Université de Berne, un questionnaire avait été envoyé au début de l’année 1998 àl’ensemble des directions ou départements cantonaux en charge des communes Ce 2
  3. 3. questionnaire contenait des séries de questions relatives à la collaboration intercommunale etaux fusions de communes du point de vue des cantons. Le taux de réponse à cette enquête aété de 100 %.Le questionnaire a été suivi en automne 1998 d’une enquête exhaustive sur le même sujetauprès des 2914 secrétaires communaux suisses d’alors, afin de rendre compte de la positiondes communes elles-mêmes. En tant que cadres salariés de l’administration, les secrétairescommunaux sont de bons connaisseurs de la situation et des conditions d’une commune.Contrairement aux présidents de commune (qui occupent souvent cette fonction à titre nonprofessionnel), ils sont aussi tendanciellement moins enclins à prendre des positionspartisanes. 2465 communes se sont prêtées à cette enquête, ce qui correspond à un taux deréponse de 84,6% pour l’ensemble de la Suisse. En Suisse alémanique, ce taux a étélégèrement supérieur à la moyenne (86,3%) ; les communes de Suisse romande ont répondu àraison de 82,8%, celles du Tessin à 79,9%.2 Limites de performance et mesures de réformeDepuis un certain nombre d’années, les communes éprouvent de plus en plus de difficultés àrépondre aux attentes normatives et à faire face à leurs multiples tâches (cf. Klöti 1989 : 6).Geser énumère un certain nombre de raisons à cet état de fait : vu l’interpénétration croissantedes niveaux politiques, les communes sont devenues de plus en plus des organes d’exécutiondes cantons et de la Confédération ; dans le domaine culturel et social, les « tâchesvolontaires » ont été amplifiées ; les citoyens ont des attentes plus élevées en matière delégitimité, de portée réelle et d’efficacité des prestations de l’administration communale.Mises à part les tâches exécutives classiques (contrôle des habitants, état civil, etc.), lesdomaines administratifs exigeants se sont par ailleurs multipliés (octroi de permis deconstruire, par exemple) (cf. Geser 1989 : 27). Un autre problème est celui de laréglementation relative à l’organisation, aux droits et obligations qui est en principe identiquepour toutes les communes d’un canton, indépendamment de leur taille ou de leur structuredémographique (cf. Arn/Friederich 1994 : 7).Ces changements, associés à des recettes fiscales stagnantes comme conséquence de la criseéconomique du début des années 90, engendrent des problèmes financiers dans denombreuses communes.1 Ce n’est plus tant l’augmentation de l’activité étatique qui est aucœur du problème mais la recherche de moyens efficaces pour remplir les tâches actuellesavec des ressources limitées.La recherche empirique en Suisse confirme ces limites de performance. Dans une étude de1994, Geser constatait que « (…) vers le milieu des années 90 aussi (…), une grande partiedes communes ont beaucoup de peine à remplir leurs tâches d’infrastructure » (Geser et al.1996 : 334). Les directions cantonales et les secrétaires communaux interrogés en 1998donnent une image semblable de la situation. Même si les communes estiment que leurcapacité administrative est généralement élevée, elles se heurtent à des limites dans différentsdomaines d’activité. L’aide sociale, l’assistance aux chômeurs et les exigences à l’encontre del’exécutif communal sont perçues comme particulièrement problématiques. D’autres1 Dans les années 1995-1997, 32% des communes suisses ont bouclé leurs comptes par un déficit. Une comparaison des résultats de cette période avec ceux de 1991-1993 montre que près de la moitié des communes qui présentaient déjà un déficit entre 1991 et 1993 se trouvaient à nouveau dans cette situation entre 1995 et 1997. Cela laisse supposer qu’il existe en Suisse des communes structurellement faibles. 3
  4. 4. domaines critiques sont l’hébergement des demandeurs d’asile, la protection civile, leproblème de l’épuration des eaux et les transports publics.Il existe différentes possibilités de réagir aux limites de performance des communes (cf.Council of Europe 1995 : 10) :- Adaptations techniques : Les communes sont maintenues dans leur effectif, mais les compétences et les ressources des différentes communes sont regroupées par le biais de la collaboration intercommunale. Les adaptations techniques comprennent aussi les modernisations internes, telles que la Nouvelle Gestion Publique, par exemple.- Adaptations structurelles : Les structures territoriales sont réaménagées, c’est-à-dire que le nombre de communes est réduit par des regroupements et des fusions.- Intensification de la péréquation financière : Les niveaux étatiques supérieurs payent des contributions financières plus élevées aux communes, afin que celles-ci puissent continuer à assumer leurs tâches.- Centralisation : Certaines tâches sont retirées aux communes et transférées aux régions voire même à la Confédération.En raison des changements sociaux et de l’accroissement des tâches, différents payseuropéens se sont trouvés confrontés à des limites de performance depuis la deuxième guerremondiale. Pour les résoudre, ils ont adopté des stratégies qui leur étaient propres. LaBelgique, les Pays-Bas et certains pays scandinaves ont plutôt opté pour des réformesstructurelles qui ont été conduites dans les années 60 et 70. La Norvège, par exemple,comptait 744 communes en 1952 et encore 439 en 1992. La Suède a réduit l’effectif de sescommunes de 2281 à 286 entre 1961 et 1992 (cf. Council of Europe 1995 : 69). Dans d’autrespays (surtout méditerranéens), il n’y eut par contre pas de réformes structurelles, ainsi enFrance, au Portugal ou en Suisse. En France notamment, les résistances politiques auxmodifications territoriales ont été considérables.Depuis les années 80, l’Europe connaît plutôt une progression des modernisations internes etun renforcement de la collaboration intercommunale (adaptations techniques). A ce sujet, leConseil de l’Europe considère que : « However, it seems that large-scale structuraladjustments on the lines of those implemented in some European Countries are no longerattractive in the economic and political context of the 1990s » (Council of Europe 1995 : 10).La Suisse s’est essentiellement focalisée sur la collaboration intercommunale, bien qued’autres mesures de réforme soient également à l’ordre du jour depuis quelques années. Letableau 1 présente brièvement les types de réformes communales qui, du point de vue descantons, ont été les plus fréquentes dans les années 90 (résultat d’une liste comprenant 18réformes possibles) : 4
  5. 5. Nombre de cantons Encouragement de la collaboration entre les communes.........................................20 Réorganisation de la répartition des tâches canton/communes.....................................20 Nouveau régime de péréquation financière...................................................................16 Création/révision de la loi cantonale sur les communes................................................12 Abandon du statut de fonctionnaire...............................................................................12 Tentatives de mise en place de mesures NGP..............................................................11 Encouragement de la fusion de communes.................................................................9 N=26Tableau 1: Réformes communales initiées dans les cantonsLes démarches privilégiées consistent à procéder à une nouvelle répartition des tâches entre lecanton et les communes (et par conséquent aussi en principe à modifier le régime de lapéréquation financière), à encourager les communes à collaborer voire à fusionner et à lancerdes projets de modernisation qui s’inscrivent globalement dans le cadre d’une NouvelleGestion Publique. La révision des lois sur les communes est une réforme subséquente, en cesens que la mise à jour des législations constitue le fondement des différentes autres réformes.3 Collaboration intercommunale3.1 Définition de la notion de « collaboration intercommunale »On entend par collaboration intercommunale l’accomplissement par deux ou plusieurscommunes ou par une tierce personne morale d’une tâche publique communale incombant àune commune. L’exécution de la tâche profite au moins à deux communes simultanément, etles communes concernées y participent de façon directe (« productive ») ou indirecte(« directive ») (cf. Arn/Friederich 1994 :5). On ne peut donc parler de coopération quelorsque des communes ne sont pas seulement concernées passivement par certains faits maisqu’elles concourent elles-mêmes activement à l’accomplissement d’une tâche communale,que ce soit de façon productive ou directive. L’interdépendance dépasse les frontièrescommunales. La réalisation de la tâche doit servir à plus d’une commune ; il n’est, enrevanche, pas forcément nécessaire que plus d’une commune prenne part à la fourniture de laprestation en tant que telle.Différentes modalités de coopération sont possibles. Celles-ci peuvent aller d’un simpleéchange de vues sans obligation légale jusqu’à une collaboration juridiquement définie voiremême décrétée par un niveau supérieur de l’Etat (pour les développements qui suivent, cf. parexemple Friederich 1997 : 1ss, Arn/Friederich 1994 : 3ss, Horber-Papazian 1997 : 4ss,Meylan et al. 1972 : 54ss et De Spindler 1998 : 118ss).2 Les formes juridiques de coopérationsont également qualifiées d‘associations de communes. En Suisse, la réglementation à ce sujetpeut varier d‘un canton à l‘autre, mais elle s‘applique à toutes les communes d‘un canton.Une seule commune peut accomplir une tâche pour d‘autres communes (modèle de lacommune-mère), ou plusieurs communes peuvent s‘acquitter ensemble d‘une tâche2 Des exemples au niveau international figurent notamment dans Marcou (1995 : 141ss) pour la France et dans Piazzi (1995 : 159ss) pour l’Italie. 5
  6. 6. (accomplissement commun des tâches au sens restreint) ou encore une personne morale peutêtre chargée de l‘exécution de la tâche.Le modèle de la commune-mère est caractérisé par une base purement contractuelle entredeux ou plusieurs communes, par une position inégale de la commune-mère et des communesassociées ainsi que par les possibilités limitées de participation des communes associées. Lesavantages de ce modèle sont sa simplicité, un investissement administratif moindre et lapossibilité d‘aménager la collaboration en fonction des besoins. Le risque financier estnéanmoins plus grand pour la commune-mère qui peut percevoir ceci comme un désavantage.En outre, la ou les communes associées ont tendanciellement moins de droits d‘intervention etde contrôle. Le modèle est peu approprié pour des tâches qui demandent une formationéquilibrée de la volonté politique.Les tâches que les communes réalisent ensemble (accomplissement en commun au sensrestreint) reposent également sur une base contractuelle. Mais les communes concernées sontsur un pied d‘égalité, et les compétences internes à chaque commune demeurent en principeinchangées. Les risques financiers sont par ailleurs répartis équitablement. Etant donné quetout est accompli en commun, cette modalité de coopération a tendance à être lourde etrésistante à l‘innovation.Si plusieurs communes décident de déléguer l‘exécution d‘une tâche à une personne morale,elles ne sont plus qu‘indirectement parties prenantes dans l‘accomplissement de cette tâche,c‘est-à-dire au travers de leurs représentants dans les organes. Car l‘on crée ainsi un nouveausujet de droit ayant une volonté propre, des droits et des devoirs propres. Les personnesmorales peuvent être des organismes de droit privé ou de droit public.Les associations de communes sont des corporations de droit public. Cette forme trèsrépandue de coopération est organisée à l‘image des communes politiques. L‘association decommunes peut donc, à l‘instar de ces dernières, se produire en toute souveraineté. Elle estplacée sous la surveillance de l‘Etat. En tant qu‘organisme assimilable à une commune, ellegarantit aussi un droit démocratique d‘intervention. On y trouve un organe exécutif et unorgane législatif; les voies décisionnelles sont tendanciellement longues. L‘association decommunes se prête le mieux à des domaines politiquement sensibles et à la prise en charge detâches souveraines. Si une association de communes ne remplit qu‘une seule tâche, il s‘agitd‘une association à but unique, si elle en remplit plusieurs, on parle d‘association à butmultiple.Une nouvelle forme de collaboration intercommunale est à l‘étude à l‘heure actuelle, à savoircelle du réseau d‘agglomération groupant en syndicat une ville-centre et les communesavoisinantes (cf. Arn/Friederich 1994: 114ss).3.2 Arguments pour et contre la collaboration intercommunaleLa littérature relève de nombreuses raisons en faveur de la collaboration intercommunale (cf.à ce propos par exemple Geser et al. 1996 : 268ss et Baumann 1998) :- Une commune a, le cas échéant, une taille suboptimale pour un accomplissement professionnel des tâches. La coopération entre plusieurs petites communes permet non seulement de tirer avantage d’un changement d’échelle administrative mais aussi d’atteindre un plus haut degré de professionnalisme. D’ailleurs, des services sociaux et des services de consultation régionaux sont fréquents dans le domaine du social et de la santé, car cela permet à la population des petites communes de bénéficier également de 6
  7. 7. prestations professionnelles (c’est-à-dire d’une offre plus grande, de meilleure qualité et tendanciellement meilleure marché).- Une autre raison qui plaide pour une coopération est une zone d’influence éventuellement trop limitée de la commune pour construire des infrastructures nécessaires mais coûteuses, telles que écoles, hôpital ou maison de retraite. Un groupement de communes permet de mieux coordonner l’offre et la demande.- Il existe en outre des tâches, comme par exemple dans les transports publics, qui transgressent les limites communales traditionnelles. Les délimitations réelles d’une commune coïncident de moins en moins avec les frontières historiques. Les interdépendances fonctionnelles ne concernent plus seulement des fonctions traditionnellement transfrontalières, telles que l’approvisionnement en eau, mais de plus en plus aussi des services culturels et sociaux.- La position des communes vis-à-vis du canton s’en trouve renforcée.- La CIC permet d’éviter les doubles emplois de certaines prestations, ce qui revient à abaisser les coûts.Economiquement parlant, les collectivités territoriales peuvent fournir leurs prestationsd’autant plus efficacement que bénéficiaires et instances de financement concordentétroitement, c’est-à-dire que les « spillovers » sont réduits (cf. Frey 1997 : 14 et De Spindler1998 : 30). Il est de plus judicieux de tendre à des économies d’échelle par une dimensionsuffisante de la prestation produite.Les raisons contre une collaboration intercommunale sont essentiellement d’ordre politique etorganisationnel. On invoque surtout la possibilité d’une perte partielle d’autonomie pourchaque commune. Certaines formes de coopération peuvent également engendrer des déficitsdémocratiques. Du point de vue de l’organisation, on déplore l’imprécision des mandats et descompétences, le manque de transparence des coûts et, finalement, le fait que des communesaient à supporter les conséquences financières de décisions sur lesquelles elles n’ont guèred’influence ou très peu. La CIC nécessite aussi de nombreuses concertations entre partenairesimpliqués, ce qui éveille des craintes de bureaucratisation (cf. à ce propos Baumann 1998 : 18et Della Santa 1996 : 75ss).3.3 La collaboration intercommunale en SuisseLa collaboration intercommunale en Suisse a une longue tradition. Des associations de droitpublic y ont été fondées au milieu du 19e siècle déjà, dont faisaient partie des petitescommunes (cf. Meylan et al. 1972 : 57).3.3.1 Appréciation faite par les cantonsEn 1998, comme le montre l’enquête effectuée auprès des directions cantonales concernées, lerenforcement de la collaboration entre les communes est un sujet de discussion dans tous lescantons du pays sans exception. Dans 19 cantons sur 26, le canton lui-même a récemment prisdes initiatives dans ce sens, et dans 14 cantons, les communes ont également œuvré en faveurd’une coopération. Des dispositions légales en la matière existent dans 24 cantons suisses, cequi atteste du poids que ces derniers accordent à la CIC. Le droit cantonal autoriseprincipalement la relation contractuelle (100%), l’association à but unique (96%), 7
  8. 8. l’association à but multiple (75%) ainsi que la personne morale de droit privé (58%) et dedroit public (58%).La forme la plus répandue est l’association de communes ou le syndicat de communes. Il enexiste au moins 1359 sur le territoire national. Comme seuls 18 cantons ont répondu à cettequestion, le chiffre réel devrait être encore bien supérieur. Tous les cantons, sauf laThurgovie, sont persuadés que la CIC va encore gagner en importance (21 cantons ontrépondu à cette question). Plusieurs cantons prescrivent même une collaborationintercommunale, en particulier dans les domaines de la santé (35%), de la formation (31%),de l’aménagement (31%) et de la gestion des déchets (27%).La collaboration entre communes fait l’objet d’intenses discussions surtout dans les cantonsoù la taille moyenne des communes est petite. La variable indépendante « valeur médiane dunombre d’habitants » explique 58% de la variance de l’activité de réforme « collaborationentre les communes ». Cette corrélation est forte (cf. tableau 2). La taille du canton et lenombre de communes par canton n’ont, par contre, qu’une faible corrélation avec cetteactivité de réforme.3 Le débat sur la CIC est également plus nourri dans ceux des cantons quiestiment que leurs communes ont des problèmes d’exécution de leurs tâches. Cette dimensionexplique 54% de la variance, ce qui peut être considéré comme une forte corrélation.Les finances cantonales et communales n’ont que peu de rapport avec un renforcement de lacollaboration intercommunale, du moins dans le cadre de l’exploitation statistique choisie.Pourtant, une intensification de la collaboration permettrait d’utiliser des synergies etd’alléger les budgets en conséquence. Corrélation avec l‘activité deCaractéristiques financières et structurelles des différents cantons réforme „Collaboration entre les communes“ (Lambda)Taille du canton- Nombre d‘habitants dans le canton 0,33 *Structure communale du canton- Nombre de communes dans le canton 0,33 *- Nombre d‘habitants par commune (valeur médiane) 0,58 **Situation financière des cantons et des communes- Pourcentage de communes présentant un déficit ces trois dernières 0,09 années- Capacité financière 1996/97 du canton 0,25- Part des dépenses communales par rapport aux dépenses du canton 0,25 et des communesProblèmes d‘exécution des communes- Difficultés des communes à remplir leurs tâches du point de vue du 0,54 ** canton**: forte corrélation (dès 0,5)*: faible corrélation (dès 0,3)N=26Tableau 2: Rapport entre les caractéristiques financières et structurelles et la collaboration entre les communes3 Au sujet de la méthode utilisée, voir Ladner/Steiner 1998 : 35ss. 8
  9. 9. 3.3.2 Appréciation faite par les communesSelon les informations fournies par les secrétaires communaux, la collaborationintercommunale joue désormais un rôle plus important. En effet, 63% des communes suissesont intensifié la CIC au cours des 5 dernières années. Dans 36% des communes, les activitésde coopération sont restées les mêmes, et seules quelques rares communes (0.6%) signalentune baisse d’intensité des contacts dans ce cadre. Ce sont surtout les communes de plus de2000 habitants qui enregistrent un renforcement de la CIC supérieur à la moyenne (cf. tableau3). Collaboration avec d‘autres communes durant les 5 dernières années a diminué n‘a pas changé a augmenté Nbre en % Nbre en % Nbre en %Nbre d‘habitants jusqu‘à 249 1 0.2 196 45.8 231 54.0 250-499 4 1.0 147 34.9 270 64.1 500-999 3 0.6 164 34.6 307 64.8 1000-1999 4 0.9 165 37.3 273 61.8 2000-4999 3 0.7 128 30.3 292 69.0 5000-9999 52 35.1 96 64.9 10000-19999 30 37.0 51 63.0 20000-49999 6 30.0 14 70.0 50000-99999 1 33.3 2 66.7 100000 et plus 5 100.0Toutes les communes 15 0.6 889 36.4 1541 63.0(N=2445)Tableau 3: Evolution de la collaboration intercommunale selon la taille de la communeSi l’on considère le nombre moyen de domaines d’activité faisant l’objet d’une collaborationintercommunale, on remarque que les petites communes (100 à 2000 habitants) ne coopèrentque dans un nombre restreint de secteurs (cf. tableau 4). Cela peut sans doute sexpliquer parle fait que les communes assument certaines tâches uniquement à partir dune certaine taille(par ex. dans le domaine culturel). 9
  10. 10. Taille de la commune Nombre moyen de domaines faisant l‘objet d‘une CIC en 1998jusqu‘à 100 9.6101-250 8.5251-500 8.7501-1000 8.11001-2000 8.72001-5000 9.55001-10000 8.810001-25000 10.025001 et plus 10.0Toutes les communes (N=2465) 8.8Tableau 4: Nombre de domaines d’activité faisant l‘objet d‘une collaboration intercommunale, selon la taille de la communeLa position de la commune dans le système de péréquation financière et la situation descomptes communaux des trois dernières années n’ont que peu d’influence sur l’évolution dela collaboration intercommunale.La différenciation par canton montre que les plus forts développements ont eu lieu dans lescantons d’Obwald, Lucerne, St-Gall, Schwytz, Genève et Appenzell Rhodes-Intérieures, avecdes taux de plus de 70%. Les cinq cantons ayant le plus grand nombre de communes (Berne,Vaud, Tessin, Fribourg et Argovie) se situent également tous au-dessus de la moyenne, àl’exception du Tessin. Comme il ressort en outre du tableau 5, c’est surtout en Suisse romandeque la collaboration intercommunale a fortement progressé. Collaboration avec d‘autres communes durant les 5 dernières années a diminué n‘a pas changé a augmenté Nbre en % Nbre en % Nbre en %Langue A 10 0.7 552 36.9 932 62.4 F 2 0.3 236 32 499 67.7 I 3 1.4 101 47.2 110 51.4Toutes les 15 0.6 889 36.4 1541 63.0communes(N=2445)Tableau 5: La CIC par région linguistiquePour toutes les tâches communales, il existe des exemples de collaboration intercommunale.Mais cette dernière se pratique le plus couramment dans le domaine des écoles, desprestations médicales, de l’épuration des eaux, de la gestion des déchets et de la protectioncivile, avec plus de 60% des communes qui accomplissent ces tâches en coopération avecd’autres communes (cf. figure 1).La CIC n’est pas encore très fréquente (taux inférieurs à 20%) dans tout ce qui a trait àl’administration générale de la commune (informatique, comptabilité, contrôle des habitants,chancellerie et gestion du personnel), ainsi qu’en matière de police communale et d’assistanceaux requérants d’asile. Il est intéressant de voir que, parmi les tâches qui font encore peu 10
  11. 11. l’objet d’une collaboration, un certain nombre posent des problèmes d’exécution auxcommunes. En effet, des limites de performance sont souvent atteintes ou dépasséesprécisément en ce qui concerne l’exécutif communal en général, l’assistance aux requérantsd’asile, l’aménagement du territoire et les plans de zones, la police communale etl’administration communale.Durant les cinq dernières années, la coopération a augmenté plus qu’en moyenne dans lesdomaines de l’assistance aux chômeurs, de la protection civile, du service du feu et des soinsmédicaux. Laggravation du chômage au début des années 90 et lexplosion des coûts de lasanté ont sans doute mis en évidence la nécessité dune collaboration intercommunale dansces domaines. Avec le service du feu et la protection civile, les communes inaugurent dessecteurs de coopération qui étaient jusqu’ici absents du débat. Promotion économique Manifestations culturelles / questions culturelles depuis plus de 5 ans Assistance aux toxicomanes depuis moins de 5 ans depuis moins de 5 ans Approvisionnement en énergie Sport / infrastructures sportives Questions concernant la jeunesse Transports publics Nouvelle pauvreté / assistance sociale / tutelle Aide et assistance aux chômeurs Service du feu Approvisionnement en eau Aide et assistance aux personnes âgées Protection civile Gestion des déchets Epuration des eaux / canalisations Soins médicaux Ecoles 0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90%Figure 1: Fréquence de la CIC par domaine d’activité (N=2391) 11
  12. 12. Les secrétaires communaux portent un jugement plutôt favorable sur la CIC et font preuve depeu de scepticisme à ce sujet, comme le montre la figure 2. Mais ils ne manifestent pasd’euphorie pour autant. Les avantages évoqués sont, entre autres, l’augmentation de l’offre deprestations et l’amélioration de la qualité des prestations. Mais les communes sont égalementconscientes que la CIC nécessite davantage de concertation avec les communes membres etque les tâches accomplies en collaboration sont moins facilement adaptables à de nouvellesconditions. En outre, une majorité d’entre elles ne croient pas que la CIC puisse alléger lebudget communal. Plus grande nécessité de se mettre d’accord avec les communes membres Adaptation moins flexible à de nouvelles conditions Augmentation de l’offre de prestations Amélioration de la qualité des prestations Les citoyens payent des émoluments plus élevés L’influence des groupes d’intérêts augmente Moins grande nécessité de se mettre d’accord avec le canton Le budget communal est allégé Modalités de collaboration peu compatibles avec la législation L’influence de l’exécutif augmente La garantie juridique diminue L’influence du parlement / des électeurs augmente 1 : s’applique totalement ne s’applique pas du tout: 5N= entre 1726 et 2241Figure 2: Arguments pour et contre une collaboration intercommunale 12
  13. 13. 4 Fusion de communes4.1 Définition de la notion de « fusion de communes »La forme la plus accomplie de la collaboration est la fusion de deux ou plusieurs communes(cf. De Spindler 1998 : 134). Par analogie au phénomène de fusion dans l’économie privée,on peut également entendre par fusion de communes la réunion de deux ou plusieurscommunes en une nouvelle commune (« absorption complète de communes au sens large »)ou l’annexion d’une commune par une autre (« absorption complète de communes au sensrestreint » ou « incorporation ») (cf. Friederich et al. 1998 : 11 et Meyer 1978 : 119ss). Lecaractère essentiel d’une fusion est l’abandon total de l’autonomie d’une ou de plusieurscommunes.4.2 Arguments pour et contre les fusions de communesLe point de départ des débats sur les fusions sont généralement des conjectures sur des taillesoptimales de commune. La littérature économique soutient ainsi que le nombre d’habitants estle critère fondamental pour déterminer la taille optimale d’une collectivité territoriale : « (…)the relevant factor is population (…) » (King 1996 : 56).Dans la littérature suisse, il est souvent fait allusion à des propositions de Hans PeterFagagnini datant de l’année 1974. Celui-ci avait calculé pour le canton de St-Gall qu’unecommune ne pouvait être dirigée à un niveau optimal des frais qu’à partir d’environ 3000habitants (cf. Fagagnini 1974 : 184). Dans d’autres pays, on part généralement de taillesminima nettement plus grandes. Ainsi, par exemple, les Allemands Nassmacher etNassmacher (1979 : 14) considèrent comme idéale une commune entre 5000 et 50000habitants. Aux Etats-Unis, on parle même d’une taille minima optimale de 20000 à 40000habitants (cf. Frenkel 1980 : 8). Ces recommandations de tailles optimales très variables selonles pays conduisent Frenkel à porter un jugement critique : « (…) I think that territorialreorganization plans show a considerable variety of minima, optima and maxima. Some of thevariety may presumably be attributed to different structural and territorial variables. Yet Idoubt whether this alone can explain such differences. » (Frenkel 1980 : 12).Bien que les tailles de communes proposées soient très variées, de telles conjectures sontnéanmoins utilisées comme argumentation pour les fusions de communes (cf. à ce sujetFrenkel 1980 : 12ss, Dafflon 1998 : 139ss, Council of Europe 1995 : 31ss et Keating 1995 :117ss) :- Arguments d’efficacité : Quelle est la taille de la commune qui permet de fournir les prestations de services nécessaires au niveau de qualité requis et aux moindres coûts ?- Arguments de démocratie : Quelle est la structure qui constitue la meilleure base de direction par l’exécutif et d’administration par les citoyens ?- Arguments de répartition : Quelle est la structure qui permet la meilleure répartition des services et des charges fiscales à l’intérieur d’un Etat ?- Arguments de développement : Dans quelles structures la croissance économique est-elle possible ?Ces arguments vont être présentés plus en détail ci-après. Des recoupements peuvent existerentre les différentes catégories. 13
  14. 14. Arguments d’efficacité :- On attend en principe d’une fusion de communes qu’elle augmente l’efficacité et la portée réelle des tâches accomplies : la qualité des prestations serait améliorée et les coûts pourraient être abaissés. Ce ne sont pas les prestations étatiques en soi qui seraient à mettre en cause mais les structures. - La qualité s’améliorerait, car les grandes communes sont à même d’offrir des prestations qui dépassent les capacités des petites communes (par exemple dans le domaine culturel). Par ailleurs, l’exécution des tâches serait plus professionnelle (« davantage, mieux, moins cher »). - Une fusion abaisserait les coûts, car les petites communes ne peuvent pas véritablement tirer profit des économies d’échelle. Tous les postes seraient, par exemple, occupés par une personne différente qui ne serait pas surchargée. Une fusion permettrait à moyen terme de réduire les dettes et aussi de diminuer les impôts.Arguments de démocratie :- Les petites communes ayant souvent de la peine à pourvoir leurs postes politiques, les possibilités de choix pourraient être améliorées. L’attrait des postes serait aussi plus grand.- Le découpage communal ne correspondrait plus à la réalité vécue. On habite par exemple une commune d’agglomération, mais on travaille dans la commune centrale.- Un autre argument avancé parfois est celui de la disponibilité ou de la capacité de réponse. On entend par là la capacité d’une commune à réagir immédiatement aux préoccupations et aux besoins de la population. On part de l’idée que des communes de plus grande taille disposent d’un personnel ayant une formation plus professionnelle et qu’elles ont aussi des voies décisionnelles plus efficaces. Une grande commune pourrait, en outre, engager plus de moyens pour répondre aux exigences des électeurs.- Si la taille d’une commune diminue, Gassmann présume que : « Pour les acteurs de la politique communale, une affectation inappropriée de biens publics – par exemple sous forme d’objets de prestige visibles – peut paraître parfaitement rationnelle lorsqu’un électorat est mal informé » (Gassmann 1993 : 238). Il y voit comme raison l’émergence probable d’une couche de notables et la disparition de vrais partis politiques. Les électeurs accorderaient alors leur voix en fonction de points de vue peu différenciés et seraient coupés de la politique par manque d’information.Arguments de répartition :- La fusion de deux ou de plusieurs communes doit viser à réduire la dépendance à l’égard du niveau étatique supérieur et à élargir l’autonomie communale. On aurait en outre plus de poids vis-à-vis du canton pour négocier.- Sans fusions de communes, les dépenses du canton seraient plus élevées, car il aurait à soutenir de nombreuses communes financièrement faibles dans le cadre de la péréquation financière et à conseiller de nombreuses petites communes. Le canton ne pourrait pas transférer davantage de tâches aux communes, car il faut tenir compte des petites communes. 14
  15. 15. Arguments de développement :- En fusionnant, les communes gagneraient en attrait et amélioreraient leur compétitivité, par exemple par la mise en valeur de nouveaux terrains à bâtir et une administration plus professionnelle.On avance aussi que, lorsque la collaboration intercommunale est déjà pratiquéeintensivement, la fusion serait une suite logique.Les réserves formulées à l’égard des fusions de communes sont néanmoins tout aussi grandes(cf. à ce propos Arn 1999 : 241ss, De Spindler 1998 : 270ss, Frenkel 1999 : 103 et Frenkel1980 : 1ss). Les arguments en défaveur se concentrent sur des problèmes d’efficacité, dedémocratie et de répartition.Arguments d’efficacité :- A côté des « economies of scale », il existerait aussi des « diseconomies of scale ». Des études ont montré qu’après une fusion, il n’y aurait généralement pas de réduction de personnel. Or, le personnel assumant de plus grandes responsabilités et recevant par conséquent des salaires plus élevés, les dépenses de personnel seraient plus importantes dans les grandes communes que dans les petites. La bureaucratie aurait tendance à prendre l’ascenseur (création de postes d’état-major, etc.). Le travail bénévole serait désormais effectué par des employés au fixe. La complexité des tâches augmenterait, de même que les besoins d’information et de coordination.- La théorie du « choix public » (Public Choice) postule qu’il existe une dimension territoriale optimale pour chaque tâche. Ce principe ne serait pas mis en pratique par la fusion de plusieurs communes, car s’il peut être judicieux que deux communes partagent la même école, il en faudrait dix pour un hôpital. Une fusion ne tiendrait pas compte de ces variations d’optima.- Il n’y aurait pas d’effets de synergie, car les communes fusionnées adapteraient ordinairement leur niveau de performance à celui de la commune qui avait auparavant le standard le plus élevé.- On dit également que « plus la commune est petite, plus les dépenses par tête d’habitant sont faibles » (Arn 1999 : 244). La situation dans les communes plus petites serait plus maîtrisable et les problèmes moins complexes. De nombreux problèmes pourraient y être résolus rapidement et de manière non bureaucratique. En outre, les prestations ne seraient pas exécutées avec le même degré de perfection comme dans les grandes communes. Vu que les petites communes seraient plutôt financièrement faibles, elles devraient adopter un mode de vie plus simple.- Le professionnalisme ne dépendrait pas de la taille d’une commune mais de l’engagement et du niveau de formation du personnel.Arguments de démocratie :- La participation politique de la population serait plus forte dans les petites communes que dans les grandes, de même que le sentiment d’appartenance. Un sondage Univox montre 15
  16. 16. effectivement que l’identification à la commune est nettement plus marquée que celle à d’autres niveaux de l’Etat (canton, Confédération) (cf. GfS 1997).- La détermination d’une taille communale optimale à valeur universelle ne serait guère possible, car les décisions de fusion relèveraient de la pesée d’exigences différentes à l’encontre d’une commune. Il s’agirait d’une décision politique, et le nombre d’habitants ne serait qu’un critère parmi d’autres (cf. Friederich et al. 1998 : 26).Arguments de répartition :- L’allégement financier du canton est une fiction aux yeux de certains auteurs, car deux communes financièrement faibles demeureraient financièrement faibles après leur fusion. En outre, l’intensité des activités de conseil ne baisserait pas vraiment, car si des communes plus grandes auraient certes moins de questions à faire résoudre par des experts cantonaux, celles-ci seraient en revanche d’autant plus complexes.4.3 Les fusions de communes en SuisseLe nombre de communes suisses n’a baissé que de tout juste 10% au cours des 150 dernièresannées (de 3203 communes en 1848, l’effectif a passé à 3101 en 1950 et à 2904 en 1999).Les fusions de communes n’ont pas de tradition en Suisse (cf. Ladner 1991 : 45ss). Il n’y eutjamais de réorganisation territoriale à grande échelle comme cela a été le cas dans les pays dunord de l’Europe déjà mentionnés (voir le chapitre 2).Les raisons à cela peuvent résider dans l’importance politique qui est attribuée aux communesen Suisse. Elles sont relativement autonomes et leur champ de compétences est assez large.Les jurisprudences cantonales constituent également un frein au processus de fusion, car ellesexigent parfois d’emprunter la voie compliquée d’une modification constitutionnelle. Un autreobstacle est plutôt de nature financière : une commune riche ne fusionnera pas sans autre avecune commune plus pauvre. Des motifs d’ordre politique et social au niveau local (rivalités,litiges de frontières, etc.) peuvent également constituer une raison de cette constance del’effectif des communes.Depuis 1950, 12 cantons ont connu des fusions de communes. Les modifications les plusspectaculaires ont eu lieu dans le canton de Thurgovie, où le nombre de communes a étéréduit de 120 unités, et dans le canton de Fribourg avec une diminution de 39 communes.4.3.1 Appréciation faite par les cantonsLors de l’enquête effectuée auprès des autorités cantonales au début 1998, 15 cantons ontindiqué que la fusion de communes était un sujet à l’ordre du jour chez eux, mais l’acuité duproblème n’est pas identique partout (cf. figure 3). En effet, 4 cantons accordent une trèsgrande importance aux fusions communales, 6 autres manifestent un intérêt certain et 7 peud’intérêt. Les fusions n’ont aucune importance dans 8 cantons. Le canton de Lucerne, parexemple, entend réduire de moitié le nombre de ses communes et encourager les coopérations(cf. Moos 1998 : 66ss). Le canton du Tessin, quant à lui, est sur le point de diminuer l’effectifdes communes de 245 à 86 unités (cf. Cantone del Ticino 1998). 16
  17. 17. Très grande Aucune importance importance 32% 16% Grande importance 24% Peu d’importance 28%N=25Figure 3: Importance que les cantons accordent aux fusions de communesDix cantons ont la possibilité de forcer les communes à fusionner par arrêté administratif.Dans les 16 autres, les autorités cantonales ont les mains liées : les communes doiventégalement approuver une fusion.Le nombre de communes dans un canton a une influence sur le débat ; en effet, lorsqu’uncanton compte de nombreuses communes sur son territoire, il manifeste davantage d’intérêtpour d’éventuelles fusions. D’autre part, si un canton a l’impression que les communes onttendance à se heurter à des limites de performance lors de l’accomplissement de leurs tâches,il prend aussi plus souvent l’initiative de faire fusionner les communes (cf. tableau 6). Il en vade même pour les cantons où un nombre important de communes ont été déficitaires au coursdes trois dernières années (1994-1996). Certains grands cantons suisses plus particulièrementvoient dans les fusions de communes une nécessité, tout comme ceux dans lesquels lesdépenses communales sont disproportionnées par rapport aux dépenses du canton et descommunes prises dans leur ensemble. Par contre, sur un plan purement statistique, l’existenceen soi de petites communes ne déclenche pas un intérêt plus marqué des cantons pour desfusions.Depuis peu, le débat sur les fusions ne porte plus exclusivement sur les communes mais gagneégalement les cantons eux-mêmes. Les propositions à ce sujet n’ont cependant pas encoresuscité de vastes discussions dans le public (cf. par exemple Schuler et al. 1999 : 92ss etKriesi 1998 : 237). 17
  18. 18. Corrélation avec l‘activité deCaractéristiques financières et structurelles des différents cantons réforme „Fusion de communes“ (Lambda)Taille du canton- Nombre d‘habitants dans le canton 0,40 *Structure communale du canton- Nombre de communes dans le canton 0,53 **- Nombre d‘habitants par commune (valeur médiane) 0,27Situation financière des cantons et des communes- Pourcentage de communes présentant un déficit ces trois dernières 0,43 * années- Capacité financière 1996/97 du canton 0,20- Part des dépenses communales par rapport aux dépenses du canton 0,40 * et des communesProblèmes d‘exécution des communes- Difficultés des communes à remplir leurs tâches du point de vue du 0,31 * canton**: forte corrélation (dès 0,5)*: faible corrélation (dès 0,3)N=24Tableau 6: Rapport entre les caractéristiques financières et structurelles et la fusion de communes projetée4.3.2 Appréciation faite par les communesDans les communes elles-mêmes, les fusions ne sont pas un sujet tabou, comme le montrel’enquête auprès des secrétaires communaux de fin 1998 : 18,2% des communes suisses ontdéjà discuté de fusion avec une ou plusieurs communes voisines (cf. tableau 7). Il s’agit iciprincipalement de communes de petite taille (moins de 1000 habitants). Mais à l’autreextrême, les grandes communes de plus de 25000 habitants manifestent également un intérêtnotoire. Y a-t-il eu des discussions concrètes de fusion? oui Nbre en %Nbre d‘habitants jusqu‘à 100 36 29.0 101-250 71 23.4 251-500 88 21.3 501-1000 86 18.1 1001-2000 70 16.0 2001-5000 62 14.7 5001-10000 17 11.6 10001-25000 8 9.2 25001 et plus 4 19.0Toutes les communes 442 18.2(N=2432)Tableau 7 : Discussions de fusion selon la taille de la commune 18
  19. 19. 7,9% des communes suisses ont des intentions concrètes de fusionner (cf. tableau 8). Ici, letaux de fréquence est supérieur à la moyenne surtout pour les communes de moins de 500habitants mais également, dans une moindre mesure, pour les villes de plus de 25000habitants. Y a-t-il des projets ou des intentions concrèt(e)s de fusion? oui Nbre en %Nbre d‘habitants jusqu‘à 100 25 20.5 101-250 32 10.7 251-500 39 9.6 501-1000 32 6.8 1001-2000 29 6.6 2001-5000 20 4.8 5001-10000 8 5.5 10001-25000 3 3.4 25001 et plus 2 9.5Toutes les communes 190 7.9(N=2412)Tableau 8 : Projets concrets de fusion selon la taille de la communeLes communes qui ont discuté d’une éventuelle fusion avec une ou plusieurs communesvoisines ou qui mènent déjà des projets concrets en ce sens sont moins bien lotiesfinancièrement que la moyenne des communes suisses. Un tableau peut illustrer cet aspect:les communes ayant présenté des comptes déficitaires sur les trois dernières années(1995-1997) ont plus souvent des projets concrets de fusion que celles ayant bouclé descomptes équilibrés ou excédentaires (cf. tableau 9). Y a-t-il des projets ou des intentions concrèt(e)s de fusion? oui Nbre en %Comptes communaux ces trois dernières années déficitaires 82 10.9 équilibrés 55 8.1 excédentaires 49 5.3Toutes les communes (N=2356) 186 7.9Tableau 9 : Projets concrets de fusion selon l‘état des comptes communauxC’est le canton du Tessin qui a le plus de projets de réforme à ce niveau : 85 communes setrouvent au stade de la planification (43,4% des communes tessinoises ayant répondu). Lecanton de Fribourg connaît également une grande activité en matière de fusions (36communes) (cf. figure 4). Ce sont deux cantons dans lesquels la fusion communale estfortement encouragée par le gouvernement cantonal. La déclaration d’intention politique des 19
  20. 20. cantons s’appuie sur des bases légales et est soutenue par des incitations matérielles à lafusion. Il existe aussi des projets de fusion sporadiques dans 14 autres cantons. Il faut releverà ce propos que les cantons qui ont un nombre élevé de communes ne font pas nécessairementpreuve d’un zèle prononcé. Projets concrets 8-85 (6) 5 (1) 4 (3) 3 (2) 2 (2) 1 (2) 0 (10)Figure 4: Projets concrets de fusion selon le cantonL’initiative d’engager une discussion sur une éventuelle fusion et de lancer des projets dans cesens provient tout aussi souvent du canton que de l’exécutif communal (municipalité resp.conseil communal, président de commune) (cf. tableau 10). Dans les communes de plus de10000 habitants, les partis politiques, les membres du législatif ainsi que l’administrationjouent également un rôle moteur dans de tels projets. Cela n’a rien d’étonnant vu que lesparlements et les partis politiques sont plutôt des caractéristiques de grandes communes. 20
  21. 21. Taille de la commune (N=534) jusqu‘à 10000 hab. en % 10001 hab. et plus en %Président(e) de commune / Syndic(que) / Maire 35,5 36,4Membres du législatif 3,9 18,2Membres de l‘exécutif 40,8 45,5Secrétaire communal(e) 16,0 13,6Administration 10,5 4,5Citoyen(ne)s engagés (hors association) 12,9 18,2Association 2,7 0,0Parti(s) politique(s) 4,9 22,7Canton 37,1 22,7Médias 3,5 4,5Milieu scientifique 0,4 4,5Conseiller(s) externe(s) 2,1 0,0Tableau 10 : Initiateurs des débats et des projets de fusion (plusieurs réponses étaient possibles)Pour qui, entre l’exécutif communal, l’administration ou la population, la fusion de leurcommune avec une ou plusieurs communes voisines est-elle le plus concevable ? Cettequestion a été posée à toutes les communes, même à celles qui n’avaient pas de projetsconcrets dans ce domaine. Les secrétaires communaux pensent que c’est l’administration quiest la plus ouverte à des réformes territoriales. Les communes italophones et francophonesprésentent ici des taux supérieurs à la moyenne. Une certaine réceptivité est égalementattribuée aux autorités exécutives. Quant à la population, elle se montrerait plutôt critique.Seuls 4,7% des secrétaires communaux suisses ayant répondu sont d’avis que les habitantspourraient très bien envisager une fusion. Les avis les plus sceptiques émanent de la Suissealémanique. Dans les communes de Suisse romande et de Suisse italienne, les secrétairescommunaux sont deux fois plus nombreux à croire que la population soutiendrait de tellesréformes.Bien que ces affirmations des secrétaires communaux puissent certes souligner des tendancesgénérales, différentes enquêtes ainsi que divers projets de fusion réalisés avec succès prouventcependant que la population n’est a priori pas si hostile à des fusions que l’administrationsemble le croire.Toutes les communes ont également été interrogées sur les avantages et les inconvénients qui– à leur avis – découleraient d’une fusion. Les avantages évoqués sont surtout de typeentrepreneurial (cf. tableau 11) : les secrétaires communaux pensent que les prestationsseraient plus professionnelles, moins chères et qualitativement meilleures. Par ailleurs, lescommunes fusionnées auraient plus de poids face au canton. Une autre raison à leurs yeux estla difficulté d’assurer une relève pour les postes politiques, surtout dans les communes pluspetites.Peu croient à une diminution du taux d’imposition et même l’argument d’une amélioration dela localisation et donc de la compétitivité paraît secondaire. Il est intéressant de souligner quela collaboration déjà pratiquée jusqu’ici avec des communes voisines n’est que rarementévoquée comme argument en faveur d’une fusion. 21
  22. 22. Suisse (N=2301) Nbre En %Possibilités de professionalisation 1181 51.3Diminution des coûts 1117 48.5Difficultés à trouver des candidats pour les postes politiques 885 38.5Plus de poids face au canton 884 38.4Amélioration de la qualité des prestations offertes 828 36.0Augmentation de l‘offre de prestations 676 29.4Surcharge au niveau de certaines prestations 550 23.9La coordination serait facilitée 543 23.6La collaboration est déjà pratiquée de manière intensive 449 19.5Aucun 360 15.6La collaboration avec le canton serait meilleure 311 13.5Le découpage communal ne correspond plus à la vie actuelle 300 13.0Avantages de localisation et de concurrence 272 11.8Diminution du taux d‘imposition 237 10.3Autres 47 2.0Tableau 11 : Avantages d‘une fusionDu point de vue des secrétaires communaux, les désavantages principaux d’une fusion sontceux qui ont trait à l’attachement à la commune (cf. tableau 12). Il serait à craindre, selon eux,que la proximité avec les citoyens et l’identification de ces derniers à leur commune ne seperdent. La commune perdrait par ailleurs aussi de son importance en tant que cellule de basede la démocratie. Enfin, les secrétaires communaux sont assez persuadés que les formesactuelles de collaboration suffisent. 22
  23. 23. Suisse (N=2340) Nbre En %Perte de la proximité des citoyens 1682 71.9L‘identification des citoyens à leur commune se perdrait 1409 60.2La commune perdrait sa signification de cellule de base de ladémocratie 1361 58.2La collaboration intercommunale suffit 1287 55.0Faible potentiel d‘économies 874 37.4Modification des rapports de force politiques 853 36.5Les habitants actuels de la commune deviendraientminoritaires 848 36.2Les frontières historiques ne peuvent pas être modifiées 614 26.2Un abandon partiel du système de milice serait nécessaire 528 22.6Augmentation du taux d‘imposition 455 19.4Les conditions locales sont telles que la fusion n‘a pas de sens 390 16.7Forte augmentation des coûts administratifs 368 15.7Pas d‘amélioration des prestations possible 319 13.6Aucun 85 3.6Autres 50 2.1Tableau 12 : Inconvénients d‘une fusion5 Rapport entre collaboration intercommunale et fusionsL’analyse du rapport entre la collaboration intercommunale pratiquée jusqu’ici et l’attitude àl’égard des fusions de communes mène à des résultats intéressants. Les communes quicollaborent déjà à l’heure actuelle de manière particulièrement intensive avec d’autrescommunes se montrent plus enclines à fusionner. Cela se vérifie tant pour la question surd’éventuelles discussions de fusion avec des communes voisines que pour la questionsubséquente sur d’éventuels projets concrets de fusion. Le tableau 13 montre, par exemple, lerapport entre l’intensité de la collaboration intercommunale et les discussions à propos defusion. Y a-t-il eu des discussions concrètes de fusion? oui Nbre en %Intensité de la collaboration jusqu‘à 5 89 14.4(nombre de domaines concernés) 6-10 168 15.6 11-15 132 23.9 16-20 34 33.0 21-25 9 27.3 26 et plus 10 21.7Toutes les communes (N=2432) 442 18.2Tableau 13 : Rapport entre discussions de fusion et intensité de la collaboration intercommunale 23
  24. 24. L’introduction de réformes de type NGP n’a que peu d’influence sur des discussions defusion. Aussi bien pour les communes qui ont déjà fait des tentatives de réorganisation dans lesens d’une Nouvelle Gestion Publique que pour celles qui en prévoient, cette démarche sedéroule indépendamment d’éventuels projets de fusion. Les réformes internes de gestion et lesréformes territoriales semblent n’avoir aucun lien de causalité.Les communes qui ont renforcé la coopération avec d’autres communes au cours des cinqdernières années attribuent un rôle plus grand à la CIC d’ici 10 ans que les autres communesde référence. On peut supposer que les communes qui ont été innovatrices par le passétiennent à le rester à l’avenir. Il en va de même pour les communes qui ont déjà réfléchi à unefusion : elles pensent que les fusions revêtiront une plus grande importance d’ici dix ans (cf.tableau 14). Rôle des fusions de communes d‘ici 10 ans grande ou très grande importance Nbre en %Y a-t-il eu des discussions non 252 14.7concrètes de fusion? oui 182 45.2Toutes les communes (N=2117) 440 20.8Tableau 14 : Rapport entre discussions de fusion et tendance présumée pour l‘avenir dans ce domaineQuant à la manière d’accomplir les tâches communales à l’avenir, les communes suissesestiment que la collaboration avec d’autres communes (moyenne de 3,7 sur une échelle de 1 à5) revêtira davantage d’importance que les fusions de communes (moyenne de 2,3) et que lacoopération avec des organismes privés (moyenne de 2,4). L’abandon de certaines tâches rendplus ou moins sceptique (moyenne de 2,4) ; les secrétaires communaux sont davantagepersuadés que les communes auront à accomplir des tâches nouvelles (moyenne de 2,8) (cf.figure 5). 24
  25. 25. Fusion de communes Coopération avec des organismes privés Abandon de certaines tâches Accomplissement de nouvelles tâches Renforcement de la coopération avec le canton Coopération avec d’autres communes 1 2 2 3 3 4 4 5 5 1 : aucun poids 5 : très grand poids(N= entre 1811 et 2277)Figure 5: Importance présumée pour l‘avenir de différentes modalités d‘accomplissement des tâches6 Jalons pour une gestion systématique de la coopération et de la fusionL’un des objectifs de la recherche dans le domaine de la coopération et de la fusion estd’élaborer des recommandations concrètes de mise en œuvre à l’attention de l’exécutifcommunal. Cet article s’est contenté de présenter jusqu’ici les divers arguments pour et contreune collaboration intercommunale et une fusion de communes ainsi que l’état actuel de laquestion. Les données recueillies et la littérature publiée jusqu’à ce jour ne permettent pas deformuler des recommandations daction ni de conjecturer sur les effets possibles. Ici, larecherche présente des lacunes.La critique des tentatives d’évaluation est acerbe chez certains auteurs. Cette critiqueconcerne en particulier les fondements théoriques souvent insuffisants et l’absence decomparaison systématique entre les objectifs de réforme (t=0) et les résultats concrets (t=1)dans les travaux empiriques. Le jugement porté par Frenkel, par exemple, est impitoyable :« All territorial goals – autonomy, efficiency, and integrative capacity – have now been foundto be of little validity if compared with actual performance or theoretical deduction » (Frenkel1980 : 31). A propos du débat sur les fusions, Friederich, Arn et Wichtermann sont dubitatifs :« Quant à dire à quel point il est réellement possible de formuler des généralités sur l’utilitééconomique des fusions de communes qui soient sûres et corroborées scientifiquement est uneautre histoire » (Friederich et al. 1998 : 33ss – trad.). 25
  26. 26. Ce dernier chapitre est consacré à un premier essai de systématisation du problème de la miseen œuvre : un cadre de référence sert à présenter les différentes dimensions qui entrent en jeuet à mettre en évidence leurs interrelations (cf. figure 6). Conditions externes à la commune Conditions générales (politico-juridiques, socio- Conditions spécifiques (parties prenantes : e.a. culturelles, économiques, technologiques) canton, associations, médias, population) Paramètres d’action médiats Conditions Conditions internes à la de la gestion politique de la personnelles commune commune Âge Stratégies Fonction (exécutif, Situation (e.a. orientation démocratie législatif) [légitimation] par rapport à financière orientation économie) Intelligence des Taille rôles Type de Profil professionnel commune et social (parti Situation politique) géographique Culture Valeurs Processus Structures de base Choix d’une forme d’organisation efficace pour la gestion des tâches Accomplissement Modes de coopération propre (make) Marché (buy) Fusion (make) Paramètres d’action immédiats Offre et Instance Lieu Manière Financement Organisation étendue de chargée de d’exécution d’exécuter la de la juridique et la la prestation de la prestation prestation politique prestation (QUI ?) prestation (COMMENT?) (COMBIEN / (POURQUOI? (QUOI ?) (OÙ ?) AVEC QUOI?) Indicateurs d’efficacité et de portée réelle pour l’évaluation de la forme d’organisationFigure 6: Le cadre conceptuel de référenceLes conditions externes et internes à la commune forment le contexte dans lequel l’exécutifpeut agir. Bien que les possibilités d’organisation et les marges de liberté soient très variablesd’une commune à l’autre, il existe des limites non modifiables à court terme. Par son action,la gestion communale modifie indirectement les stratégies de la commune, les processus debase, les structures et la culture (paramètres d’action médiats). Notamment les décisionsrelatives au mode de coopération resp. à la fusion entraînent de telles modifications. 26
  27. 27. Le but de chaque stratégie choisie est d’accomplir les tâches avec efficacité et d’atteindrel’objectif fixé. Les modalités possibles peuvent être situées sur un continuum ayant pour pôlesles dimensions marché (achat de la prestation) et hiérarchie (possibilités d’accomplissementpropre ou de fusion) et pour forme intermédiaire les modes de coopération (cf. Fuest 1998 :105ss).Pour mettre en place le mode de coopération ou de fusion, la direction de la commune peutmodifier des paramètres concrets, appelés aussi paramètres d’action immédiats. Ceux-ciconstituent les degrés possibles de liberté. Des indicateurs de portée réelle et d’efficacitésoutiennent le processus de décision. Ils servent à évaluer si un mode de coopération ou unefusion est approprié à un accomplissement de la tâche avec l’efficacité recherchée et les effetsescomptés (cf. Haldemann 1997 : 80ss).Pour conclure, nous aimerions revenir de manière plus approfondie sur les paramètresd’action que l’exécutif peut en principe modifier directement pour mettre en œuvre lacoopération ou la fusion :- Offre et étendue de la prestation (QUOI) La commune doit déterminer la tâche communale qui est à accomplir en collaboration avec une ou plusieurs autres communes. Il peut s’agir d’une seule tâche ou de plusieurs voire de toutes les tâches en cas de fusion.- Instance chargée de la prestation (QUI) La commune doit clarifier la répartition des compétences au niveau vertical entre le canton et les communes tout comme au niveau horizontal entre les communes concernées. Elle doit également régler le problème de la délimitation entre situation juridique, financement et exécution (désenchevêtrement, péréquation financière verticale), ceci en collaboration avec le canton. En termes de gestion d’entreprise, il s’agit de faire coïncider tâches, compétences et responsabilités (« qui paie commande »). Au niveau intercommunal, la prestation peut être fournie soit par une seule commune (« modèle de la commune-mère ») soit de pair par plusieurs communes (« accomplissement commun des tâches au sens restreint ») ou encore par une tierce personne morale. La discussion peut également porter sur l’outsourcing respectivement sur la délégation de tâches à des organismes privés sous mandat (voir le chapitre 3.1).- Lieu d’exécution de la prestation (OÙ) La composante spatiale est étroitement liée aux instances chargées de la prestation. A l’époque de la mobilité accrue, des nouvelles technologies de l’information et des interdépendances croissantes, il n’est plus absolument nécessaire, pour certaines tâches, que la prestation soit fournie dans la commune même. Les exigences fonctionnelles peuvent entrer en conflit avec des réalités historico- politiques. Ainsi, selon la tâche communale à accomplir, différents espaces idéaux peuvent entrer en ligne de compte. Frey voit, par exemple, dans les FOCJ (Functional overlapping competing jurisdictions) une forme efficace de prestation : une entité administrative à taille optimale est constituée pour chaque tâche. Un citoyen est alors membre de plusieurs entités administratives qui n’accomplissent chacune qu’une seule 27
  28. 28. tâche et qui sont en outre en concurrence les unes avec les autres (cf. Frey 1997 : 11ss et De Spindler 1999 : 27ss).- Manière d’exécuter la prestation (COMMENT) Un problème central réside dans la manière dont la prestation doit être produite, tel que cela est discuté, par exemple, dans le cadre de la Nouvelle Gestion Publique (cf. Schedler 1995 : 127ss).- Financement et coûts de la prestation (COMBIEN / AVEC QUOI) Il convient de clarifier de quelle façon les coûts de mise en œuvre et les prestations fournies doivent être financés par les partenaires impliqués (dépenses d’investissement et d’exploitation). Il peut s’agir de coûts tant matériels qu’immatériels. Si les moyens ne sont pas obtenus par les prestations contractuelles des utilisateurs ou par le prélèvement de taxes causales auprès des personnes à l’origine de la prestation, il ne reste – en-dehors du subventionnement par le niveau étatique supérieur – que la répercussion des coûts sur les communes concernées (cf. Arn/Friederich 1994 : 90).- Organisation juridique et politique (POURQUOI) Lors de la réalisation d’une coopération et d’une fusion, des considérations d’ordre juridique et politique sont à prendre en compte. Toute forme de coopération et en particulier une fusion ont des effets sur les conditions politiques locales. Dans une première phase se pose la question des modalités de planification politique, c’est-à-dire de savoir comment les besoins et surtout les réactions des personnes concernées peuvent être intégrés le plus tôt possible dans le processus de planification. Cest la légitimation de laction étatique quil s’agit de clarifier : quel rôle et quelle fonction l’électorat a-t-il vis-à-vis de l’exécutif et de l’administration ? Une fusion peut notamment restreindre à court terme les droits démocratiques des citoyens, étant donné que les décisions sont désormais prises en commun avec la ou les autres communes fusionnées. D’un autre côté, vu que la commune décide de projets qui ont une plus grande portée, la marge de manœuvre peut augmenter à moyen terme. Le rôle de la législation est également à examiner de manière critique. Dans quelle mesure peut-on encore gérer les tâches communales avec les règles de droit classiques basées sur des programmes conditionnels (dispositions de si-alors). Ne faut-il pas plutôt des programmes finalisés par rapport à des objectifs ou des programmes relationnels qui intègrent aussi des effets de rétroaction ? On peut aussi se poser la question si une normalisation trop forte ne nuit précisément pas au principe de légalité et par là au traitement égalitaire de faits comparables (cf. Friederich/Wichtermann 1997 : 28ss). 28
  29. 29. 7 Bibliographie citéeArn, Daniel (1999): Liegt die Zukunft in der Fusion von Gemeinden? In: Schweizerisches Zentralblatt für Staats- und Verwaltungsrecht, 100e année, no 5, mai 1999, pp. 241-253Arn, Daniel et Ueli Friederich (1994): Gemeindeverbindungen in der Agglomeration. Zurich 1994Baumann, Andreas (1998): Gemeinden, Verbände, Regionen: Zusammenarbeit und direkte Demokratie. In: Der politische Raum, édité par Bruno Meier. Baden 1998, pp. 18-26Cantone del Ticino (1998): Il cantone e i suoi comuni. L’esigenza di cambiare. Bellinzona 1998Council of Europe (1995): The size of municipalities, efficiency and citizen participation. Strasbourg 1995Dafflon, Bernard (1998): Suisse: Les fusions de communes dans le canton de Fribourg. Analyse socio-économique. In: Annuaire des collectivités locales, édité par le Crédit local de France et la Direction générale des collectivités locales. Paris 1998EFV (1999): Schulden von Bund, Kantonen und Gemeinden. Internet: http://www.efv.admin.ch/ oehfina/d/soehschu.htmFagagnini, Hans Peter (1974): Kanton und Gemeinden vor ihrer Erneuerung: eine interdisziplinäre Studie über den inneren Aufbau des Kantons St. Gallen. Berne 1974Frenkel, Max (1999): Die Fahrt in die schöne, nicht mehr so neue Welt der Gebietsreform. Mögliche Ziele - mögliche Probleme. In: Neue Zürcher Zeitung, 220e année, no 105, 8/9 mai 1999, p. 103Frenkel, Max (1980): Optimizing what? Some considerations on federalism, comparative research, and optimal size of federal units. Riehen 1980Frey, Bruno S. (1997): Ein neuer Föderalismus für Europa: Die Idee der FOCJ. Tübingen 1997Friederich, Ueli, Daniel Arn et Jürg Wichtermann (1998): Neubildung politischer Gemeinden im Kanton Schaffhausen. Überlegungen zu einer optimalen Gemeindegrösse und zu Vor- und Nachteilen von Gemeindefusionen. Berne 1998Friederich, Ueli (1997): Rechtsformen interkommunaler Zusammenarbeit. In: Information der Dokumentationsstelle Raumplanungs- und Umweltrecht, octobre 1997, pp. 1-10Fuest, Ute (1998): Die Organisation von Kooperationen. Rahmen, Parameter und Modelle der Gestaltung von Interorganizational Relations. Bamberg 1998Gassmann, Uwe (1993): Kommunale Ausgaben als Ergebnis politisch-ökonomischer Entscheidungsprozesse? Berne, Stuttgart, Vienne 1993Germann, Raimund E. (1998): Öffentliche Verwaltung in der Schweiz. Berne, Stuttgart, Vienne 1998Geser, Hans, François Höpflinger, Andreas Ladner et Urs Meuli (1996): Die Schweizer Gemeinden im Kräftefeld des gesellschaftlich und politisch-administrativen Wandels. Zurich 1996 29
  30. 30. Geser, Hans (1989): Die kommunale Milizverwaltung in der Bewährungsprobe. In: Die Gemeinden an der Leistungsgrenze? édité par la Schweizerische Arbeitsgemeinschaft für Demokratie. Zurich 1989, pp. 26-47GfS (1997): UNIVOX-Datenbank. Modul II A Staat. Berne, Zurich 1997Haldemann, Theo (1997): Evaluation von Politik und Verwaltungsreformen. Institutionelle und materielle Auswirkungen von NPM- und WOV-Projekten In: Gesetzgebung heute, 8e année, no 3, 1997, pp. 63-108Horber-Papazian, Katja (1997): La collaboration intercommunale en Suisse: Document de synthèse. Projet non publié. Lausanne 1997Keating, Michael (1995): Size, Efficiency and Democracy: Consolidation, Fragmentation and Public Choice. In: Theories of Urban Politics, édité par Judge, David, Gerry Stoker et Harold Wolman. Londres, Thousand Oaks, et New Delhi 1995, pp. 117-134King, David (1996): A Model of Optimum Local Authority Size. In: Development in Local Government Finance, édité par Pola, Giancarlo, George France et Rosella Levaggi. Cheltenham, Brookfield 1996, pp. 55-76Klöti, Ulrich (1989): Lösbare Gemeindeprobleme. In: Die Gemeinden an der Leistungsgrenze? édité par la Schweizerische Arbeitsgemeinschaft für Demokratie. Zurich 1989, pp. 5-9Kriesi, Hanspeter (1998): Die Schweiz der Regionen. In: Der politische Raum, édité par Bruno Meier. Baden 1998, pp. 237-242Ladner, Andreas et Reto Steiner (1998): Gemeindereformen in den Schweizer Kantonen. Konzeptionelle Grundlagen und empirische Ergebnisse einer Kantonsbefragung. Rapport de travail no 28 de l‘IOP, Université de Berne. Berne 1998Ladner, Andreas (1991): Politische Gemeinden, kommunale Parteien und lokale Politik. Zurich 1991Marcou, Gérard (1995): Intermunicipal cooperation as a means to improve the efficiency of local authorities. In: The size of municipalities, efficiency and citizen participation, édité par le Conseil de l‘Europe, Strasbourg 1995, pp. 141-152Meyer, Hannes Anton (1978): Wandlungen im Bestande der Gemeinden. Belp 1978Meylan, Jean, Martial Gottraux et Philippe Dahinden (1972): Les communes suisses et l‘autonomie communale. Lausanne 1972Moos, Hans (1998): Gemeindefusionen im Kanton Luzern. In: Der politische Raum, édité par Bruno Meier. Baden 1998, pp. 66-73Nassmacher, Hiltrud et Karl-Heinz Nassmacher (1979): Kommunalpolitik in der Bundesrepublik. Opladen 1979Piazzi, Tonino (1995): Intermunicipal cooperation as a means to improve the efficiency of local authorities. In: The size of municipalities, efficiency and citizen participation, édité par le Conseil de l‘Europe, Strasbourg 1995, pp. 159-179Della Santa, Marzio (1996: Dalla Collaborazione alla Fusione. Analisi degli aspetti economici, istituzionali e sociologici del Comune. Fribourg 1996Schedler, Kuno (1995): Ansätze einer wirkungsorientierten Verwaltungsführung. Berne, Stuttgart, Vienne 1995 30
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